La procédure de récupération d’un permis de conduire invalidé pour défaut de points s’appuie sur plusieurs fondements juridiques, et l’un des plus efficaces (et le plus souvent soulevé) est le défaut d’information préalable du conducteur sur le retrait de points, visé aux articles L 223-3 et R223-3 du Code de la Route.

En effet, il faut savoir qu’à la commission d’une infraction, l’automobiliste verbalisé doit se faire notifier, en application desdits articles, du nombre de points retirés sur son permis de conduire.

Lorsqu’une procédure de récupération de permis est engagée devant le Tribunal Administratif, la charge de la preuve de cette information préalable au contrevenant repose sur les épaules de l’administration : il incombe donc à l’administration d’apporter la preuve, par la production de la souche de la quittance dépourvue de réserve sur la délivrance de l’information, que celle-ci est bien intervenue.

En l’absence de production des souches des avis de contravention, les pertes de points peuvent ainsi être annulées par le Juge administratif.

Or, la jurisprudence était dernièrement devenue beaucoup plus restrictive, suite à trois arrêts rendus par le Conseil d’Etat en date 24 juillet 2009 : ainsi, même si l’administration était incapable de produire aux débats les souches des avis de contravention, ces arrêts  considéraient que la simple production, par l’administration, du relevé d’information intégral du conducteur indiquant le paiement des amendes forfaitaire suffisait  à considérer que la réalité de l’infraction est établie dans les conditions prévues à l’article L. 223-1 du code de la route.

L’administration n’avait donc, dès lors, qu’à produire en justice qu’un simple relevé d’information intégral (qui est un simple document administratif faisant l’historique de vos pertes de points) indiquant le paiement des amendes, pour qu’il devienne impossible d’obtenir la récupération des points retirés sur le permis de conduire sur ce fondement.

Ces arrêts ont été vivement critiqués par les Avocats en droit routier, car les mentions indiquées sur ce simple listing administratif – qui plus est édité et modifiable par l’administration – ne sauraient présupposer en elles-mêmes de la bonne délivrance de l’information à l’automobiliste verbalisé.

Fort heureusement, dans un avis en date du 8 juin 2011, et publié au Recueil Lebon, le Conseil d’Etat est revenu sur sa position :

« III. ― Lorsqu’une contravention soumise à la procédure de l’amende forfaitaire est relevée avec interception du véhicule et donne lieu au paiement immédiat de l’amende entre les mains de l’agent verbalisateur, le contrevenant se voit remettre non les documents régis par les dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale mais, en application de l’article R. 49-2 du même code, une quittance de paiement.

Le modèle de cette quittance comporte une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, qui doit être regardée comme ayant été délivrée préalablement au paiement de l’amende dès lors que le contrevenant conserve la faculté de renoncer à la modalité du paiement immédiat de l’amende avant de procéder à la signature de la quittance ou, le cas échéant, d’inscrire sur celle-ci une réserve sur les modalités selon lesquelles l’information lui avait été délivrée.

En conséquence, il incombe à l’administration d’apporter la preuve, par la production de la souche de la quittance dépourvue de réserve sur la délivrance de l’information, que celle-ci est bien intervenue préalablement au paiement. La mention, au système national des permis de conduire, du paiement immédiat de l’amende forfaitaire au titre d’une infraction relevée avec interception du véhicule n’est donc pas, à elle seule, de nature à établir que le titulaire du permis a été destinataire de l’information requise.

Le présent avis sera notifié à la cour administrative d’appel de Nantes, au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration et à M. Bernard Gendron.
Il sera publié au Journal officiel de la République française. »

Le Conseil d’Etat vient donc de mettre fin à cette malheureuse parenthèse jurisprudentielle en indiquant qu’il incombait à l’Administration de produire la souche de la contravention ou de la quittance de paiement,  et que la simple production du relevé d’information intégral n’était pas en soi suffisante.

Ce dont on ne peut que se féliciter.